Le jeûne en islam consiste à se retenir de faire les annulatifs du jeûne (voir l’article « annulatifs du jeûne ») pour Allah de l’aube jusqu’au coucher du soleil. Les savants ont divergé concernant celui qui fait un annulatif du jeûne par oubli ou erreur.
Quel est le jugement de manger par oubli durant le jeûne ?
-Le premier avis :
Celui qui mange par oubli ou erreur n’a pas annulé son jeûne et il doit le terminer normalement
Les savants de cet avis :
La majorité des savants, parmi eux : L’imam Ahmed (mort en 241 de l’hégire), l’imam Chafi’i (mort en 204 de l’hégire).
Arguments :
وَلَيْسَ عَلَيْكُمْ جُنَاحٌۭ فِيمَآ أَخْطَأْتُم بِهِۦ وَلَٰكِن مَّا تَعَمَّدَتْ قُلُوبُكُمْ ۚ وَكَانَ ٱللَّهُ غَفُورًۭا رَّحِيمًا
Nul blâme sur vous pour ce que vous faites par erreur, mais (vous serez blâmés pour) ce que vos cœurs font délibérément. Allah, cependant, est Pardonneur et Miséricordieux. [33:5]
رَبَّنَا لَا تُؤَاخِذْنَآ إِن نَّسِينَآ أَوْ أَخْطَأْنَا
Seigneur, ne nous châtie pas s’il nous arrive d’oublier ou de commettre une erreur. [2 : 286]
عَنْ أَبِي ذَرٍّ الْغِفَارِيِّ ، قَالَ : قَالَ رَسُولُ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ : » إِنَّ اللَّهَ قَدْ تَجَاوَزَ عَنْ أُمَّتِي الْخَطَأَ، وَالنِّسْيَانَ، وَمَا اسْتُكْرِهُوا عَلَيْهِ « .
D’après Abou dharr, Messager d’Allah a dit : « Allah a pardonné aux membres de ma communauté ce qu’ils font par erreur, par oubli ou sous la contrainte. » [ibn Majah : 2043]
عَنْ أَبِي هُرَيْرَةَ رَضِيَ اللَّهُ عَنْهُ، قَالَ : قَالَ رَسُولُ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ : » مَنْ نَسِيَ وَهُوَ صَائِمٌ، فَأَكَلَ، أَوْ شَرِبَ ؛ فَلْيُتِمَّ صَوْمَهُ، فَإِنَّمَا أَطْعَمَهُ اللَّهُ وَسَقَاهُ « .
D’après Abou Hourayra, le Prophète a dit : « Celui qui oublie et mange ou boit alors qu’il jeûne, qu’il complète son jeûne, car c’est certes Allah qui l’a nourri et l’a abreuvé ».
[Mouslim :1155]
-Le deuxième avis :
Celui qui mange par oubli ou erreur a annulé son jeûne. Il doit rattraper son jeûne, mais de doit pas faire d’expiation.
Les savants de cet avis :
L’imam Malik (mort en 179 de l’hégire) et son cheikh Rabi’a ibn Abi Abderahman (mort en 136 de l’hégire).
Arguments :
Se retenir de faire ce qui annule le jeûne est un pilier du jeûne. Lorsqu’il manque un pilier a un œuvre, celle-ci est nulle. La prière de celui qui manque un pilier de la prière par erreur ou par oubli n’est pas valide. Il en est de même pour le jeûne.
L’avis qui semble le plus juste (et Allah est le plus savant)
Celui qui mange par oubli ou erreur n’a pas annulé son jeûne et il doit le terminer normalement.
Le hadith d’Abou Hourayra est une preuve claire concernant cette question : « Celui qui oublie et mange ou boit alors qu’il jeûne, qu’il complète son jeûne, car c’est certes Allah qui l’a nourri et l’a abreuvé ». [Mouslim :1155]
Dans ce hadith le prophète a ordonné de continuer le jeûne. De plus, il a confirmé le jeûne de celui qui mange ou boit par oubli par sa parole « qu’il complète son jeûne » le prophète a utilisé le mot « jeûne » malgré qu’il ait mangé ou bu. Cela montre que manger par oubli ou erreur n’annule pas le jeûne. (1)
Réponse au groupe deux :
Les savants qui voient que celui qui mange par oubli ou par erreur doit rattraper son jour de jeûne ont fait une analogie avec la prière. Le prieur qui sort de sa prière en ayant oublié un pilier doit obligatoirement rattraper sa prière ou son unité de prière. Et cela même s’il a oublié un pilier par oubli ou par erreur.
Comme nous l’avons dit dans la définition de l’analogie, pour qu’une analogie soit correcte elle doit comporter quatre piliers.
La branche (far’):
Il s’agit d’une question religieuse nouvelle qui nécessite un jugement religieux. Si le savant ne trouve pas la sentence dans le coran, la sunnah ou le consensus il s’oriente alors vers l’analogie.
Important : il est impératif que la branche (far’) ne possède pas de sentence religieuse dans le coran, la sunnah ou le consensus autrement le l’analogie n’est pas valide, car il n’y a pas d’analogie en présence d’un texte.
- L’origine (Asl):
Il s’agit d’une sentence religieuse prouvée par le coran, la sunna ou un consensus.
3- La sentence (le hukm) :
Pour que l’analogie soit correcte, il faut obligatoirement que la sentence religieuse de la branche (far’) soit la même que celle de l’origine (asl) une fois l’analogie effectuée.
4- La cause (´illa) :
La cause de la sentence religieuse doit impérativement connue, car c’est le lien indispensable entre la branche et l’origine.
À travers ceci, nous nous apercevons immédiatement que leur analogie n’est pas correcte. En effet, dans leur analogie il n’y a aucune branche. La prière est une adoration et Allah et son messager nous ont enseigné la jurisprudence de la prière. Et il en est de même pour le jeûne. Chacune de ses adorations à une jurisprudence qui leur est propre et des jugements qui leur sont propres. Nous avons des textes clairs qui nous indiquent que celui qui mange ou boit par oubli ou par erreur doit continuer son jeûne et ne pas le rattraper. Il n’est pas permis de faire une analogie pour contredire un texte clair.
Remarque :
Quant à celui qui mange ou boit par ignorance puis pense que son jeûne est nul et se met à manger volontairement et en connaissance de cause. Celui-ci aura annulé son jeûne et devra le rattraper. (2)
2) Quel est le jugement d’avoir un rapport sexuel par oubli ou erreur ?
Rapport sexuel par oubli :
Le couple qui oublie que nous sommes le premier du mois de ramadan et qui a un rapport sexuel après la prière du fajr.
Rapport sexuel par erreur :
Le couple qui pense avoir un rapport sexuel durant la nuit, mais se rend compte que l’heure du fajr (début du jeûne) était rentrée.
-Le premier avis :
Celui qui a un rapport sexuel par oubli ou erreur n’a pas annulé son jeûne et il doit le terminer normalement.
Les savants de cet avis :
Moujahid (mort en 104 de l’hégire), Al hassan al Basri (mort en 110 de l’hégire), l’imam Abou hanifa (mort en 150 de l’hégire), l’imam Chafi’i (mort en 204 de l’hégire), Ishaq ibn Rahawayhi (mort en 238 de l’hégire).
- Arguments :
وَلَيْسَ عَلَيْكُمْ جُنَاحٌۭ فِيمَآ أَخْطَأْتُم بِهِۦ وَلَٰكِن مَّا تَعَمَّدَتْ قُلُوبُكُمْ ۚ وَكَانَ ٱللَّهُ غَفُورًۭا رَّحِيمًا
Nul blâme sur vous pour ce que vous faites par erreur, mais (vous serez blâmés pour) ce que vos cœurs font délibérément. Allah, cependant, est Pardonneur et Miséricordieux. [33:5]
رَبَّنَا لَا تُؤَاخِذْنَآ إِن نَّسِينَآ أَوْ أَخْطَأْنَا
Seigneur, ne nous châtie pas s’il nous arrive d’oublier ou de commettre une erreur. [2 : 286]
عَنْ أَبِي ذَرٍّ الْغِفَارِيِّ ، قَالَ : قَالَ رَسُولُ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ : » إِنَّ اللَّهَ قَدْ تَجَاوَزَ عَنْ أُمَّتِي الْخَطَأَ، وَالنِّسْيَانَ، وَمَا اسْتُكْرِهُوا عَلَيْهِ « .
D’après Abou dharr, Messager d’Allah a dit : « Allah a pardonné aux membres de ma communauté ce qu’ils font par erreur, par oubli ou sous la contrainte. » [ibn Majah : 2043]
-Le deuxième avis :
Celui qui a un rapport sexuel par oubli ou erreur a annulé son jeûne. Il doit rattraper son jeûne, mais de doit pas faire d’expiation.
Les savants de cet avis :
‘Ata ibn abi Rabah (mort en 114 de l’hégire), Al Awza’i (mort en 157 de l’hégire), Layth ibn Sa’d (mort en 175 de l’hégire), l’imam Malik (mort en 179 de l’hégire), l’imam Ahmed (mort en 241 de l’hégire).
Arguments :
عَنْ أَبِي هُرَيْرَةَ رَضِيَ اللَّهُ عَنْهُ، قَالَ : قَالَ رَسُولُ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ : » مَنْ نَسِيَ وَهُوَ صَائِمٌ، فَأَكَلَ، أَوْ شَرِبَ ؛ فَلْيُتِمَّ صَوْمَهُ، فَإِنَّمَا أَطْعَمَهُ اللَّهُ وَسَقَاهُ « .
D’après Abou Hourayra, le Prophète a dit : « Celui qui oublie et mange ou boit alors qu’il jeûne, qu’il complète son jeûne, car c’est certes Allah qui l’a nourri et l’a abreuvé ».
[Mouslim :1155]
Aspect argumentatif
Celui qui a un rapport sexuel par erreur ou oubli est différent de celui qui mange ou boit par oubli ou erreur. Manger ou boire par erreur est facile à faire et s’accomplit en une fraction de seconde. Contrairement à celui qui a un rapport sexuel. Il y a généralement beaucoup d’étapes à franchir avant d’accomplir l’acte sexuel. Il est donc plus facile de se rappeler que nous sommes en état de jeûne contrairement à la boisson ou la nourriture qui sont beaucoup plus instinctives.
Le troisième avis :
Celui qui a un rapport sexuel par oubli ou erreur a annulé son jeûne. Il doit rattraper son jeûne et faire l’expiation de celui qui a eu un rapport sexuel durant la journée de ramadan.
Savant de cet avis :
L’avis le plus connu de l’imam Ahmed (mort en 241 de l’hégire).
Argument :
عَنْ أَبِي هُرَيْرَةَ رَضِيَ اللَّهُ عَنْهُ، قَالَ : جَاءَ رَجُلٌ إِلَى النَّبِيِّ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ، فَقَالَ : هَلَكْتُ يَا رَسُولَ اللَّهِ، قَالَ : » وَمَا أَهْلَكَكَ ؟ « . قَالَ : وَقَعْتُ عَلَى امْرَأَتِي فِي رَمَضَانَ، قَالَ : » هَلْ تَجِدُ مَا تُعْتِقُ رَقَبَةً ؟ « . قَالَ : لَا. قَالَ : » فَهَلْ تَسْتَطِيعُ أَنْ تَصُومَ شَهْرَيْنِ مُتَتَابِعَيْنِ ؟ » قَالَ : لَا. قَالَ : » فَهَلْ تَجِدُ مَا تُطْعِمُ سِتِّينَ مِسْكِينًا ؟ » قَالَ : لَا. قَالَ : ثُمَّ جَلَسَ، فَأُتِيَ النَّبِيُّ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ بِعَرَقٍ فِيهِ تَمْرٌ، فَقَالَ : » تَصَدَّقْ بِهَذَا « . قَالَ : أَفْقَرَ مِنَّا ؛ فَمَا بَيْنَ لَابَتَيْهَا أَهْلُ بَيْتٍ أَحْوَجُ إِلَيْهِ مِنَّا، فَضَحِكَ النَّبِيُّ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ حَتَّى بَدَتْ أَنْيَابُهُ، ثُمَّ قَالَ : » اذْهَبْ، فَأَطْعِمْهُ أَهْلَكَ « .
Abou hourayra rapporte : un homme vint trouver le Prophète et lui dit : « je suis perdu, ô messager d’Allah ! – qu’est-ce qui t’a perdu ? – j’ai eu des relations charnelles avec mon épouse durant le mois de Ramadan. – As-tu un esclave à affranchir ? – Non. – Peux-tu jeûner deux mois consécutifs ? – Non. – As-tu de quoi nourrir soixante pauvres ? – Non. » L’homme s’assit, et on apporta au prophète un panier contenant des dattes ; le Prophète lui dit : « donne cela en aumône. » l’homme répondit : « À plus pauvre que nous ? Il n’y a pas, aux alentours de Médine, de famille qui en ait plus besoin que la nôtre. » le prophète rit au point que l’on voit des canines, puis il dit : « va, et nourris-en ta famille. » [Mouslim :1111]
Aspect argumentatif
Dans ce noble hadith, le prophète a enjoint à accomplir l’expiation de celui qui a eu un rapport sexuel. (3)
Le prophète n’a pas demandé à cet homme s’il avait fait cela par oubli ou par erreur. Cela indique donc qu’il n’y a pas à faire la différence entre ceux qui fait cela volontairement, par oubli ou par erreur.
L’avis qui semble le plus juste (et Allah est le plus savant)
Celui qui a un rapport sexuel par oubli ou erreur n’a pas annulé son jeûne et il doit le terminer normalement
Les textes concernant le jeûne nous indiquent que celui qui commet un annulatif du jeûne par erreur ou oubli n’a pas annulé son jeûne et doit le continuer. Ceci est une base sur laquelle il faut s’appuyer. Celui qui prétend que tel ou tel annulatif du jeûne fait par oubli ou erreur annule le jeûne doit ramener une preuve claire.
Réponse au groupe trois
Les savants qui ont obligé le remboursement du jeûne ainsi que l’expiation, car selon eux le prophète n’a pas demandé à l’homme s’il avait eu des rapports sexuels avec sa femme volontairement, par oubli ou par erreur.
Cependant, le contexte du hadith nous montre clairement que cet homme a eu un rapport sexuel avec son épouse de manière volontaire. C’est pour cela qu’il s’est adressé au prophète en disant : « je suis perdu, ô messager d’Allah ! ». Sa parole montre qu’il savait qu’il avait commis un grand péché, c’est-à-dire avoir un rapport sexuel durant la journée de ramadan. Le contexte étant clairement connu du prophète, il n’avait pas à lui demander s’il avait fait cela volontairement ou par oubli. (4)
Article rédigé par Ilyas Abou Roumayssa, le 09/04/2022
(1):Fath Al bari, ibn hajar, tome 4/page 157.
(2): Charh moumti’, Mohammed ibn Salih al Outhaymin, tome 6/page 400.
(3): – Affranchir un esclave
Si la personne n’a pas la capacité de faire cela.
– Jeûner deux mois consécutifs
Si la personne n’a pas la capacité physique de faire cela.
– Nourrir soixante pauvres
(4): Fath Al bari, ibn hajar, tome 4/page 156-157.